De Muhammad Yunus, New Age Islam
(Co-auteur, conjointement avec Ashfaque Ullah Syed), Message Essentiel de l'Islam, Amana Publications, USA, 2009
28 Juin 2012
Le titre prônant que les musulmans confondent la religion universelle de l'Islam avec ses cinq piliers doit être choquant pour ces derniers, indépendamment de leurs secte et orientations théologiques. Mais comme ils le lisent à travers l'article, si Dieu peut les guider, ils verront comment leur dévotion fondamentaliste et obsessionnelle aux cinq piliers de la foi les a détachés de la source de l'orientation coranique et les a réduits virtuellement à la pratique d'un culte.
Durant sa vie, le Prophète a fait prêter serment d'allégeance à ceux qui voulaient entrer dans l'Islam. Le serment, couronné par la foi en Dieu et en Son Prophète, comprenait une série d'engagements qui ont été adaptés aux priorités immédiates de la communauté. Ces engagements ont été considérés comme les piliers de la foi. Ils incarnaient l'essence de la foi ainsi que les fonctions clés des convertis comme nouveaux membres de la communauté musulmane à venir. Ils ne représentaient néanmoins pas le résumé de la Parole de Dieu - la révélation coranique que les scribes enregistraient et que les Huffaz mémorisaient. Comme les priorités de la communauté musulmane changeaient avec le temps, les promesses ou les piliers liminaires changeaient également.
Ainsi, à un stade précoce de la période Medinite (622-632), le Prophète reçu le serment d'un petit groupe de visiteurs venus à lui pour entrer dans l'Islam qu', i) ils n'associeraient rien à Dieu, s'abstiendraient de voler, commettre l'adultère, tuer leurs enfants, accuser une personne innocente et désobéir à un ordre pour ce qui est ma'ruf (bon). [1]
Comme les Arabes païens se sont familiarisés avec ces interdictions et avaient à peine besoin de rappel lors de la conversion, et les priorités de la communauté changèrent, les interdictions ont été remplacées par des ordres à la prière, la Zakat, au jeûne et au butin de guerre [2]. Après l'intégration de la Mecque (huitième année de la période Medinite), le butin de guerre fut abandonné et le hajj, les ablutions et tous les commandements (ahkam) de Dieu, avec la prière, la Zakat, le jeûne furent considérés comme les seuls critères des actes de quelqu'un ('amal) [3]. Peut-être est-ce à l'époque du calife Umar que les cinq piliers tels que nous les avons aujourd'hui ont été canonisés, tandis que les engagements importants n'ont pas été précisés, mais ils restent bien entendu implicites car il ne peut y avoir Islam sans les conseils ou ahkam de Dieu.
Le Premier Pilier de la Foi
Le premier pilier de la foi est la croyance en l'unité et la toute-puissance englobante, non diluée et non partagée de Dieu (tawhid) et Muhammad (PSSL) en tant que Messager de Dieu. Il peut être rendu comme suit :
«Je témoigne qu'il n'y a pas d'autre divinité que Dieu et Muhammad est le Messager de Dieu ».
Tout non-musulman qui veut entrer dans l'Islam doit faire cette déclaration (en arabe) d'une manière solennelle en toute sincérité et conviction. Une révélation précoce (Sourate 112) capte son esprit de monothéisme absolu comme suit :
«Il y a un seul Dieu (Ahad) - l'éternel et l'absolu (Samad). Il n'est ni unique, ni fait il engendrera et rien n'est comparable à Lui. "(Sourate 112)
Le texte coranique proclame à plusieurs reprises l'Unicité de Dieu et utilise un chapelet d'attributs pour transmettre les manifestations multiformes de ses paroles (kalimat). Celles-ci apparaissent surtout dans des paires complémentaires tels que Celui qui Pardonne et le Miséricordieux, Celui qui se Repentit et le Miséricordieux, Celui qui Sait et le Sage »... mais aussi dans un groupe :
« C'est Lui, Allah. Nulle divinité autre que Lui; Le Souverain, Le Pur, L'Apaisant, Le Rassurant, Le Prédominant, Le Tout Puissant, Le Contraignant, L'Orgueilleux. Gloire à Allah! Il transcende ce qu'ils Lui associent (59:23). C'est Lui Allah, le Créateur, Celui qui donne un commencement à toute chose, le Formateur. A Lui les plus beaux noms. Tout ce qui est dans les cieux et la terre Le glorifie. Et c'est Lui le Puissant, le Sage. » (59:24)
L'objet de la révélation coranique, cependant, n'était pas seulement de proclamer l'unicité de Dieu et sa glorification afin que l'humanité ne cesse de louer et glorifier Dieu. Si il s'agissait du seul plan divin, la révélation aurait eu lieu en l'espace de quelques semaines et non durant plus de deux décennies.
Le but exprimé dans le Coran était de guider l'humanité des ténèbres vers la lumière (2:257, 14:01, 57:9), pour la délivrer du fardeau qui pesait sur elle jusqu'alors (7:157) et ceci impliquait que l'humanité soit guidée vers des paradigmes divins sociaux, moraux et éthiques, qu'elle soit inspirée par l'entreprise intellectuelle et l'illumination, et que sa conscience soit éveillée à des impératifs moraux universels. Ainsi, la notion coranique de l'Unicité de Dieu est inextricablement liée à l'obéissance aux instructions divines. « Ibadah » dans l'élocution du Coran ne profère pas sans cesse que Dieu est Un, Dieu est Grand, ou Dieu est Louable (le Coran comprend une centaine d'attributs de Dieu) ; « Ibadah » englobe aussi un engagement à obéir à Dieu, à suivre ses conseils. Ainsi, se conformer aux instructions de Dieu demeure au cœur du tawhid, et les conseils de Dieu se rapportent à l'ensemble des conditions humaines et ne peuvent se limiter littéralement aux piliers obligatoires de la foi. Cela semble empirique, spirituellement terne et même intenable, mais la vérité est - certains des grands et universellement acclamés savants de l'Islam ont fait allusion à ce paradoxe - la dichotomie entre l'application littérale des piliers de la foi et les conseils englobants du Coran.
Pour citer Muhammad Abduh (1849-1905) :
- « La plupart de ce qui se passe aujourd'hui au nom de l'Islam n'est pas du tout l'Islam. Il n'a peut être que conservé l'enveloppe extérieure du rituel islamique de la prière, du jeûne et du pèlerinage, ainsi que quelques paroles, qui ont toutefois été perverties par des interprétations allégoriques. Toutes ces accrétions sinistres et superstitions qui ont trouvé leur chemin dans l'Islam ont fait stagner ce qui passe maintenant pour la religion ». [ Muhammad Husayn Haykal, La vie de Mahomet, la traduction anglaise du 8e édition par Ismail Ragi, Karachi, 1989, p. 585.]
Pour citer Muhammad Iqbal (1877 -1938) :
- «Que voulez-vous atteindre en affirmant Tawhid avec votre langue? -
- Vous avez en effet fait un groupe de cinq idoles votre Dieu ».
- (Bange dara - tasweere dard:
- « Zuban say gar Kiya tawhid ka dawa tu Kiya hasil
- Banaya hai bute pindar ko apna khuda tu nay »).
- "Que dire de ce monde, même les cieux pleurent du fait de la malhonnêteté de votre vision - C'est une malédiction que vous ayez effacé les lignes du Coran ».
- (Bange dara - tasweere dard:
- «Zamin kiya asmaan bhi teri kajbini pe rota hai -
- Ghazab hai satre Coran ko chalipa kar diya tu nein »).
Conclusion : La direction divine telle qu'intégrée dans le Coran englobe, entre autres vertus, la justice, l'équité, la liberté, les bonnes actions, de bonnes relations de voisinage et inter-confessionnelles, la tolérance, le pardon, l'équité de genre, l'éthique dans les affaires, le paiement équitable des biens et services, l'application de la raison ('aql), la pensée logique (fiqha), la rectitude (rashada) dans le traitement des affaires et toute une gamme de normes de comportements et d'impératifs moraux. Les musulmans considèrent en grande partie ces directives comme un complément ou une option aux cinq piliers de la foi qu'ils croient être les seuls commandements obligatoires de Dieu - à l'exclusion de ses autres préceptes. En conséquence, ils omettent souvent toute référence à celles-ci dans leurs discours religieux et les relèguent au plus profond de leurs pensées. Ainsi, tous les sites islamiques se limitent à l'horaire de la prière et aux autres piliers de la foi, mais n'allouent presque pas d'espace aux vertus universelles, normes comportementales et éthiques et aux impératifs moraux de l'Islam.
De manière ironique, les divers éléments de l'orientation coranique ont, dans le cours de l'histoire, imprégné la société humaine mondiale et contribué à son illumination, son progrès et avancement, alors que les musulmans se maintiennent rigoureusement et résolument éloignés des idéaux coraniques (sauf pour les piliers de la foi), et cherchent à obtenir des conseils de leurs ressources théologiques secondaires - les Hadiths et la loi islamique classique. Bien que déjà très tard, il est grand temps pour les musulmans d'élargir l'horizon de la bande actuellement étroite des piliers de la foi au spectre vaste et panoramique de l'orientation coranique - de crainte qu'ils ne se réduisent à un culte comme l'Occident chrétien le déclare ouvertement et leur dévouement exclusiviste le démontre.
Notes
1. Sahih al-Bukhari, traduction anglaise par Mohsin Khan, New Delhi 1984 Vol.1, Acc. 17
2. Ibid., Acc. 50.
3.Ibid., Chap. 42, « Le livre de la Croyance ».
Muhammad Yunus, qui est diplômé en génie chimique de l'Indian Institute of Technology et cadre à la retraite, s'est engagé dans une étude approfondie du Coran depuis le début des années 90, en se concentrant sur l'essence de son message. Il est co-auteur des travaux exégétiques mentionnés, qui ont reçu l'approbation d'al-Azhar al-Sharif, au Caire en 2002 suite à leur restructuration et affinage. Ils ont été approuvés et authentifiés par le Dr Khaled Abou El Fadl de l'UCLA, et publiés par Amana Publications, Maryland, USA, 2009.
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